L'Odalisque allongée

 

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Rouge, or, taffetas, luxure masquée, volupté ! Quelle beauté, quelle splendeur, que d'émotions à contempler ce corps nu de femme dont on effleure le visage du regard. Comme une apparition, l'odalisque diaphane se mêle à la richesse des tissus. L'or se cristallise sur ces parures de velours et de petites grappes dorées, mêlés à la passion sanguine des drapés contribuent à achever avec grâce ce songe de lumière.

Rêves d'Orient somptueux, le tableau pleure de dorures, de tapis et de tentures. Cette odalisque, anatomiquement imparfaite, avec son ventre allongé et le galbe extraordinaire de ses seins, n'apparait-elle donc pas comme un rêve ? Si elle me trouble aujourd'hui, je suis sure qu'elle dû troubler bien des hommes du temps où elle fut exposée la première fois. Ses contours flous et les plaisirs auxquels elle appelle ne seraient-ils donc pas une chimère, un feu follet perdu dans cette chaleur si caractéristique des oeuvres de Benjamin Constant, peintre de ces femmes sorties d'un imaginaire fantasmagorique ? Ivresse des Salammbô et des nuits orientales, cette oeuvre respire l'encens et les épices. Il appelle à l'extase, au frottement et au ruissellement des corps, de cette tension presque sexuelle qui n'est en fait que le voile d'une passion ... Entre le sublime et le sauvage, les senteurs florales et les senteurs fauves. L'Odalisque dévoile son ventre pétri de douceur, cachant à peine son sexe. Allanguie, on en revient à ses lèvres, à ses bras qui se déploient. Rêve de cette journée d'été qui jaillit au coeur de la nuit, Odalisque n'est que la forme presque palpable de nos envies d'ailleurs. Puisque la réalité est si triste, tout le luxe de cette oeuvre créée en 1870, est de poursuivre, par delà le temps et les siècles, cette incarnation sublime du rêve, en redonnant ses lettres de noblesse au fantasme. Je suis sous le charme. Je peux sentir l'oeuvre, sentir ce qui pourrait s'en dégager. Cette chaleur, ces broderies, ce coussin moelleux et ce tissu énervant qui cache un fruit jeune et plein de vie ! Je me sens homme en la regardant, je me sens femme en me projettant, rêvant d'être à mon tour la parure de cette montagne de plaisirs.

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