Un ouvrage excellent, à lire de toute évidence avant l'auto-dafé de 2012. Orgasmique !

 

Gérard Noiriel, presque vingt ans après Le Creuset français, publie à nouveau un ouvrage appelé à faire date dans l'historiographie de l'immigration. Il se penche cette fois sur la fabrication du discours public sur les étrangers et des politiques migratoires. Alors que la France a été, tout au long du XXe siècle, l'une des premières terres d'immigration au monde, cette vocation n'a jamais été assumée. En même temps que la consolidation de l'Etat-nation dans le cadre républicain s'est constituée ainsi une vision de l'étranger comme "problème".

Car "le problème de l'immigration" ne date pas d'hier. Depuis le provincial arrivé depuis peu aux périphéries des villes, jusqu'au "jeune des banlieues issu de l'immigration", le nouveau venu n'a cessé d'être perçu comme une menace: "souillure" sanitaire ou symbolique, délinquance, loyauté douteuse à la patrie et à la République, concurrence déloyale pour l'emploi national, inassimilable à "l'ethnie", à la "race", à "l'identité" françaises…

Ce discours s'est appliqué aux réfugiés juifs fuyant les persécutions, aux Polonais, aux Arméniens, aux Espagnols… Gérard Noiriel s'inscrit en faux sur l'idée qu'il soit la conséquence du seul mépris colonial. Les crises économiques (1880, 1930…) ont engendré des tensions xénophobes, euphémisées avec les "meilleures" cautions scientifiques (sans se croire antisémite, on pouvait assurer dans les années 1930 qu'il existait un "problème juif"). Ces tensions ont inspiré les médias de masse qui dictent l'agenda des politiques, nourri l'hostilité des déclassés contre les étrangers "favorisés"… Un livre d'histoire d'une brûlante actualité!

 

Source : Alternatives Internationales n° 035 - juin 2007
 
 
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